Une Master Blender singulière

Si le mois dernier nous vous parlions d’une des pionnières dans le whisky, ce mois-ci c’est une figure bien contemporaine que nous vous présentons : Angela d’Orazio.
Angela a commencé à travailler pour la distillerie en 2002 en tant que consultante, puis en 2004 elle en est devenue la Master Blender – maître-assembleur – le poste le plus important dans une distillerie. C’est celui/celle qui – entre autres – crée les recettes pour développer les whiskies et s’assure de leur bonne production.
Alors qu’on sortait du confinement volume un, Maud a eu la chance de discuter avec Angela, en direct de la Suède – on voyage comme on peut en ce moment. Angela est la Master Blender des whiskies Mackmyra, la référence du whisky suédois depuis 1999.
Un parcours hors du commun.
Souvent, dans l’industrie des spiritueux, c’est au fruit de longues années d’études en sciences et chimie, d’apprentissage minutieux aux côtés de master blender confirmés qu’on accède à un tel poste.
Angela a tracé son chemin jusque-là par une passion sans faille, un travail acharné et une détermination puissante. Ses premiers amours sont les métiers de l’hospitalité, elle débute comme serveuse, puis se forme au métier de sommelier. Au cours de sa formation, elle rencontre un ami qui la connecte avec la marque de single malt écossais : Glenmorangie. Elle en devient la première Brand Ambassadrice en Europe.
Après cette première expérience, elle officie comme manager pour le restaurant & club suédois Akkurat, elle y dresse une cave de plus de 500 références de whiskies.
Elle participe à l’organisation du premier Guinness World Record Whisky Tasting en Suède, et sera par la suite responsable de compétitions de whisky au Stockholm Beer & Whisky Festival de 1996 à 2011.
Avec son ex-mari, elle fonde la branche suédoise de la très honorable Scotch Malt Whisky Society (SMWS) – l’autorité mondiale par excellence en matière de single cask, single malt.
Forte de ses rencontres, elle a cultivé sa connaissance des whiskies en sachant s’entourer d’experts pour la guider, la former… Ce qui fut d’une aide précieuse lorsqu’en 2004 elle a été appelée à la tête du développement des whiskies pour Mackmyra, alors une toute jeune distillerie.
Depuis 2002, elle collabore déjà avec la distillerie en tant que consultante à l’élaboration des recettes. Après sa nomination, elle a pu prendre les rênes de la création en réunissant toute l’aide et les conseils de ses mentors, notamment Jim McEwan, de son équipe et de ses amis en Ecosse.
N’ayant jamais fait cela auparavant, elle mesure l’importance d’être bien entourée pour réussir.
La création de whisky demande une bonne maîtrise de la chimie et de l’ingénierie, n’étant pas issue de ce milieu, c’est en autodidacte qu’elle s’est formée.
Ses efforts ont largement été récompensés puisqu’elle a reçu de nombreuses distinctions notamment celle de Whisky Legend, Hall of Fame 2019 par le Whisky Magazine.
Garder l’esprit libre avant tout
Lorsqu’on a demandé à Angela si elle voyait une différence entre la manière d’aborder cette position en tant que femme sa réponse est pleine de justesse: “oui et non, peut-être qu’une femme a une vision à plus long terme, mais c’est davantage la personnalité qui est importante. Néanmoins, les femmes ont plus de difficultés à pénétrer l’univers. Quoiqu’on en dise, c’est plus simple pour les hommes car il s’agit d’un monde d’hommes qui, parce qu’ils boivent entre hommes, apportent des hommes. L’entrée est plus difficile pour les femmes, c’est aussi plus dur car si on est dans un univers particulièrement masculin, on est encore plus regardé, on a beaucoup à prouver pour réussir.”
Elle qui tire sa plus grande réussite d’avoir su équilibrer son épanouissement professionnel en consacrant un temps personnel important à l’enseignement de cours de danse Nia est de ces gens qui “think out of the box”. Un des derniers exemples en date est son whisky vieilli en partie dans des fût ayant contenu diverses variétés de thé vert, une recette innovante !
Le whisky n’a pas de genre
Alors, quand il s’agit de différencier les hommes et les femmes consommateurs de whisky, pour elle c’est une hérésie. Les gens qui apprécient les whiskies que ce soit des scotchs ou des single malts, ce sont des personnes qui apprécient les belles choses de la vie… Il n’y a donc pas de whisky pour femmes (on applaudit évidemment des deux mains !).
Elle nous a laissé un dernier conseil pour celles que le whisky effraient un peu. Il s’agit de faire appel à un bon guide, qui saura vous faire tester de bons whiskys en ayant le plus de saveurs..
On ne peut pas être snob sur le whisky, un bon connaisseur sera forcément heureux de partager son savoir !