La First Lady of Scotch.

Impossible de parler de femmes spiritueuses sans mentionner la « First Lady of Scotch » : Bessie Williamson.
Au-delà de son impact positif sur l’univers des spiritueux, c’est aussi une femme à l’histoire inspirante, dont l’aventure humaine mérite d’être racontée.
Mais reprenons depuis le début.
En 1934, fraîchement diplômée de l’université de Glasgow, Bessie Williamson décide de passer ses vacances à Islay, alors LA destination de loisirs par excellence – en Ecosse, on s’entend ! Séduite par l’île, elle trouve un poste de secrétaire à la Distillerie Laphroaig. Parfait se dit-elle, pour quelques mois. Mais c’est sans compter sur ses compétences et son sens du travail, rapidement identifiés comme prometteur par le dirigeant de la distillerie lui-même : Ian Hunter.
Rapidement, il lui propose un poste d’office manager, qu’elle accepte. Face à ses aptitudes se révélant chaque jour plus grandes, il lui demande très vite de gérer la distillerie lors de ses voyages d’affaire. Frappé par un AVC en 1938, il lui confie le rôle de responsable des affaires avec les Etats-Unis – un des marchés clés du whisky, à l’époque et encore aujourd’hui.
Saisir les opportunités.
Elle devient ensuite manager de la distillerie, un des rôles les plus importants d’une distillerie. Peu de temps après sa prise de fonction, Islay devient une zone militaire protégée qui accueille plus de 200 soldats et des tonnes d’armes et équipement militaire.
L’armée sollicite alors Bessie pour réquisitionner des espaces de la distillerie et y stocker des armes. Durant cette période, elle fait preuve d’une grande détermination et place toujours les intérêts de sa distillerie en premier, même lorsque l’armée se fait pressante.
Après la guerre, l’âge d’or.
En 1954, Ian Hunter décède et lègue à Bessie les rennes de Laphroaig. La distillerie est alors surtout connue pour les malts qu’elle fournit aux autres distilleries pour créer des blends (un petit B.A.BA des différents types de whiskys vous attend ici), et qui apportent une note tourbée aux scotches. Mais Bessie est convaincue que les whiskies puissants et fumés de Laphroaig peuvent séduire le palais des consommateurs.
Maligne, elle commence alors à marketer le profil si spécifique de l’île d’Islay, plutôt que de se concentrer uniquement sur sa Maison ; elle introduit la notion de Single Malt Scotch auprès des consommateurs. Son discours, novateur, intrigue la puissante Scotch Whisky Association, qui fait de Bessie son ambassadrice aux Etats-Unis de 1961 à 1964.
Là-bas, elle prêche la haute qualité des Single Malts Scotches, apportant aux consommateurs une nouvelle lecture des whiskies. Celle-ci a sans nul doute contribué à faire des Single Malts un segment très fort de l’industrie aujourd’hui.
Le début de la fin…
Elle se marie en 1961 avec une star de la chanson canadienne, qui a une fâcheuse tendance à vouloir la conformer au rôle de la femme de cette époque. Elle continue à poursuivre malgré tout son business ; pour agrandir et rénover la distillerie, elle est forcée de revendre ses parts à Lord John Distillers.
Par conséquent, elle perd progressivement le pouvoir sur sa distillerie qu’elle quitte en 1972.
Malgré tout, elle reste une figure iconique du monde du whisky, sur lequel elle a eu un impact positif. Mais elle avait également une âme profondément philanthropique, ayant à cœur de ne jamais laisser ses employés dans le besoin, et pouvait choisir de maintenir leur poste bien que l’âge de retraite soit largement dépassé.
Sa philanthropie fut même récompensée par la Reine d’Angleterre qui lui remit la médaille du Très Vénérable Ordre de l’Hôpital de Saint-Jean de Jérusalem.
Visionnaire, généreuse et courageuse, sont les qualificatifs qui font que Elizabeth Bessie Williamson est pour toujours la Lady of Scotch.